L'armée algérienne a lancé jeudi après-midi une opération pour libérer les otages, retenus depuis mercredi sur un site gazier du centre-est de l'Algérie, près de la frontière libyenne dans le centre-est algérien. Cette opération s'est terminée en fin de soirée. Au moins onze activistes ont été tués lors de cette intervention finale. On parle également de la mort de 30 otages.
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Abou al-Baraa, le chef du commando qui a pris en otages mercredi des centaines de personnes, dont des étrangers, sur un site gazier en Algérie, a été tué jeudi, a annoncé un porte-parole du groupe auteur du rapt à l'agence mauritanienne Nouakchott information (ANI).
Le ministre algérien de la Communication Mohamed Said a annoncé dans le même temps la fin de l'opération de l'armée visant à libérer les otages. Il n'a pas fourni de bilan sur le tribut payé par les otages, se contentant de faire état d'un "nombre important d'otages libérés et malheureusement quelques morts et blessés".
Selon une source de la sécurité algérienne, reprise par Reuters, au moins onze activistes ont été tués lors de cette intervention finale, dont un ressortissant français. Dans ce groupe figurent deux Algériens, dont le chef du commando djihadiste, Tahar ben Chened, de même que trois Egyptiens, deux Tunisiens, deux Libyens et un Malien.
Trente otages, dont au moins sept ressortissants étrangers, ont également été tués. Il s'agirait de huit Algériens, deux Japonais, deux Britanniques et un Français, toujours selon cette source. La nationalité des autres victimes n'est pas claire pour le moment.
Notons que ce bilan n'est toujours pas officiel.
L'inquiétude de la communauté internationale
Mais les capitales occidentales n'ont pas caché leur inquiétude sur l'issue de ce qui a été présenté par les jihadistes liés à Al-Qaida comme les premières représailles à l'intervention française au Mali lancée le 11 janvier.
"Je pense que nous devons nous préparer à la possibilité de mauvaises nouvelles à venir", a averti le Premier ministre britannique David Cameron, qui a regretté de ne pas avoir été informé à l'avance par Alger et a reporté un important discours sur l'Europe prévu vendredi.
Le président François Hollande avait noté auparavant que la crise "semblait se dénouer dans des conditions dramatiques".
La Maison Blanche a dit "essayer obtenir des éclaircissements" du gouvernement algérien tandis que le Japon a émis "une ferme protestation" et demandé à Alger de "cesser immédiatement" son opération militaire.
Pas de Belge impliqué
Après la première offensive militaire de l'armée algérienne, un des ravisseurs, cité par l'agence mauritanienne en ligne Nouakchott information (ANI), avait annoncé que sept étrangers étaient toujours en vie et retenus en otage sur le site gazier d'In Amenas.
"Trois Belges, deux Américains, un Japonais et un Britannique ont survécu au raid des avions algériens contre leur lieu de détention", avait-il déclaré sans parler des otages algériens mais en appelant les responsables du complexe pétrolier à "secourir les otages blessés".
Le ministère belge des Affaires étrangères, qui dans un premier temps avait fait savoir qu'il n'avait "aucune indication" sur la présence de trois ressortissants belges sur le site gazier, a confirmé qu'il n'y avait pas de Belges sur place "après vérifications et recoupements".
Un bilan humain confus
Plus de 24 heures après l'attaque des jihadistes, le nombre exact comme la nationalité des otages restaient imprécis. Outre les très nombreux travailleurs algériens, il y aurait eu plus d'une quarantaine d'Occidentaux, dont des Américains, Britanniques, Japonais, Français, Irlandais et Norvégiens.
Une trentaine d'Algériens ont réussi à s'échapper du site d'In Amenas, exploité par le groupe britannique BP, le norvégien Statoil et l'algérien Sonatrach, ont annoncé jeudi les autorités locales. D'autres Algériens avaient été libérés la veille par petits groupes.
Dublin a annoncé jeudi qu'un Irlandais était sain et sauf. Quinze étrangers, dont un couple de Français, selon la chaîne privée algérienne Ennahar, ont réussi à fuir le complexe situé près de la frontière libyenne.
La Grande-Bretagne a confirmé le décès de son ressortissant
Le ministère britannique des Affaires étrangères a confirmé la mort d'un de ses ressortissants. Le ministère irlandais des Affaires étrangères a indiqué pour sa part qu'un citoyen irlandais, originaire de la province britannique d'Irlande du Nord, faisait partie des personnes kidnappées. "Nous avons des informations sur un certain nombre de Japonais qui sont détenus, mais nous les vérifions actuellement", a déclaré de son côté un porte-parole gouvernemental à Tokyo.
L'épouse d'un employé norvégien a annoncé à la presse que son mari faisait aussi partie des otages. "Mon mari m'a appelée ce matin. Il m'a dit qu'il avait été pris en otage", a déclaré la femme citée par le journal local Bergens Tidende (BT). L'intéressée a précisé que son époux lui avait fourni un numéro de téléphone à transmettre à la police, apparemment celui des ravisseurs selon elle. "Il y avait quelqu'un qui lui dictait ce qu'il devait dire en anglais. La police a appelé le numéro qu'il m'a donné. La conversation a été coupée après quelques secondes", a-t-elle dit.
Les islamistes seraient membres d'Al Qaïda
Les ravisseurs se sont présentés comme les "Signataires par le sang" de l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, récemment destitué par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Ils ont assuré réagir "à la croisade menée par les forces françaises au Mali".
"Selon toutes les informations que nous avons, le groupe terroriste qui a attaqué le site pétrolier à In Aménas est venu de Libye", a déclaré pour sa part le ministre à Echorouk en ligne, quotidien arabophone algérien.
D'après le site d'information mauritanien Al-Akhbar, Abou al-Baraa, était "l'un des plus importants chefs de la brigade de Mokhtar Belmokhtar" qui a revendiqué l'attaque contre le site.
Mokhtar Belmokhtar, surnommé le borgne, est un ex-chef d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) avec laquelle il est entré en dissidence en octobre dernier pour créer sa propre unité combattante.
"Probablement de nationalité algérienne", al-Baraa est né à la fin des années 1970 et est devenu membre du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) au début des années 2000, selon Al-Akbar.
Al-Maraa avait notamment contribué à l'implantation d'islamistes armés dans le nord du Mali, aujourd'hui occupé par ces groupes, toujours selon le site. Il soulignait la nécessité de faire tomber les régimes de la région pour parachever le Printemps arabe, et accusait Alger et Nouakchott d'être les agents de la France dans la région.
Une action préparée de longue date ?
Le Premier ministre britannique, David Cameron, a jugé jeudi que cette attaque en Algérie présentait "un degré considérable de planification".
Des experts estiment également que les islamistes avaient décidé d'attaquer l'exploitation gazière avant le début de la guerre au Mali.
"L'opération était très probablement déjà programmée, on n'improvise pas dans ce domaine", a déclaré sur Europe 1 l'ancien chef du contre-espionnage français Yves Bonnet, qui s'est dit surpris par l'ampleur de l'attaque.
Un avis partagé par l'ancien ministre de la Défense UMP Gérard Longuet, invité de LCI jeudi matin : "On ne peut pas imaginer qu'en moins d'une semaine, une telle prise d'otages ait pu être conçue par une filiale d'Al Qaïda ou Aqmi", a-t-il dit. "En tout état de cause, c'est un objectif qui avait été préparé."
BP annonce l'évacuation de travailleurs "non-essentiels" d'Algérie
Le groupe pétrolier britannique BP a annoncé jeudi qu'il était en train d'évacuer d'Algérie "un groupe de travailleurs non-essentiels", alors qu'une prise d'otages est en cours sur un site gazier du pays qu'il exploite avec le norvégien Statoil et l'algérien Sonatrach.
Un porte-parole de l'entreprise n'était pas en mesure de préciser le nombre de salariés concernés.
"La situation demeure incertaine" sur le site d'In Amenas, dont l'armée algérienne tente de reprendre le contrôle, indique par ailleurs BP dans un communiqué, précisant ne pas pouvoir confirmer s'il y avait eu des victimes.
Le groupe britannique se présente comme le plus gros investisseur étranger en Algérie. Il est implanté sur les sites gaziers d'In Salah à 1200 kilomètres au sud d'Alger dans le Sahara et d'In Aménas, où a lieu la prise d'otages.